Eglise Romane d’Avenas dans le Beaujolais

mardi 30 juillet 2019


Avenas est une petite commune du Beaujolais qui abrite une petite église romane du XIIe siècle qui vaut le détour pour son très bel autel sculpté et classé. L’église Notre-Dame d’Avenas dépendait jadis du diocèse de Mâcon. d’après les légendes, cette petite église fut bâtie sur les ruines de l’ancien monastère du Pélosge.

Le mystère de l’Autel d’Avenas

Une petite merveille unique en France constitué de quatre blocs en calcaire blanc marmoréen. Sur son panneau principal sculpté on peut découvrir le Christ en majesté entouré des douze apôtres. Sur la face nord (à gauche en regardant l’autel de face), quatre scènes de la vie de la Vierge (Annonciation, Nativité, Présentation de Jésus au Temple et Assomption). Enfin, sur la face sud (à droite) une scène étonnante où l’on voit un roi Louis le Pieux remettant au chapitre de Saint-Vincent de Mâcon une maquette de l’édifice.

Voici quelques explications extraites de l’ouvrage intitulé " Les paroisses du diocèse de Lyon : archives et antiquités / par l’abbé Ad. Vachet", auteur : de Vachet, Adolphe (1845-1912). Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France.

Extrait

" L’autel d’Avenas, un des plus anciens monuments chrétiens qu’il y ait dans les églises de nos régions, a été l’objet d’intéressantes controverses, où furent émises diverses opinions. Pendant longtemps on a été à ce sujet dans l’indécision, aujourd’hui, grâce à la connaissance d’anciennes chartes du Chapitre de Saint Vincent de Mâcon, qui était patron d’Avenas et nommait à la cure, je crois que la lumière est définitivement faite et que le doute n’est plus permis.

Dans l’église d’Avenas, sous le maître-autel du côté de l’épître, il y avait un fort beau rétable de marbre blanc en relief où était représenté un personnage avec Une couronne royale, Rex Ludovicus, c’est le Roi Louis. Il fléchit le genou, il a dans ses mains une chapelle qu’il présente à un religieux, lequel la reçoit, et pour marquer l’acceptation qu’il en fait, il a la main gauche sur son coeur. Au dessous, ces quatre vers gravés en grosses lettres, partie gothiques, partie romaines :

Rex Ludovicus pius et virtutis amicus
Offertam Ecclesiam recipil Vincentius islam
Lampade bissena fluiturus Julius ibat
Mors fugat obpositum regis ad intitum.

C’est là-dessus que s’est exercée la sagacité des archéologues, et il y a de quoi, car on peut bien franchement avouer que ces vers sont intraduisibles. _ Tous ceux qui ont voulu leur donner un sens ont été obligés d’y changer quelque chose.

  • Première version
    Severt, dans ses Evêques de Mâcon (p. 32 et 33), dit qu’il s’agit de Louis-Ie-Débonnaire, empereur et roi de France. Allant à un concile à Aix en Provence et traversant la province de Lyon, gouvernée par Bermond, environ l’an 824, il résolut de raser entièrement le château de Ganelon, bâti sur le sommet de la montagne de Torvéon, l’une des plus hautes du Beaujolais, et que Charlemagne avait déjà fait détruire en partie. En actions de grâces de la victoire remportée sur ce tyran, il fit bâtir une église dédiée à la Sainte Vierge, dans le territoire d’Avenas, peu éloigné de Torvéon, et confia le soin de la desservir à des religieux qui résidaient alors dans le même territoire, près le. Foux ou Foutaux d’Avenas ; ce qui est désigné en partie par ce relief et les vers qui sont au bas. Cet événement, selon le même auteur, arriva le 12 Juillet, qu’il croit être exprimé par ces mots : Lampade bissena Julius ibat. — Il n’y a point là de traduction proprement dite, et une des difficultés de ces vers, le dernier mot intitum, qui veut dire aussi bien intuitum qu’interitum, n’est pas résolue. De plus il faut remarquer qu’en 824, Louis-le-Débonnaire n’est pas allé à un concile, à Aix, puisqu’il n’y a pas eu de concile à Aix cette année-là. Cochard qui a adopté cette version remplace Mors par Mars, et je né vois pas que le sens en bénéficie.
  • Seconde Version
    M. l’abbé Boué, qui mourut curé d’Ainay, donna une autre explication. Selon lui, le Saint est Saint Vincent, représentant le Chapitre de Mâcon, le roi est Saint Louis partant pour la croisade. Il venait de réunir à la couronne le comté de Mâcon ; pour s’attirer la bienveillance de ses nouveaux vassaux, il accueillit favorablement la demande du Chapitre de Saint Vincent de faire élever une église à Avenas. Comme, à la veille de cette expédition hasardeuse, il était naturel de faire des voeux pour la conservation du roi, le fugat du texte doit être un fugiat, un souhait, que la mort s’éloigne à la vue du roi. — Et cela se passait le 12 Juillet 1248.
  • Troisième version
    M. Auguste Bernard repousse très-vivement, trop vivement, les opinions précédentes et en particulier la première qu’avait adoptée M. de la Roche-Lacarelle dans son Histoire du Beaujolais. D’après lui, il ne s’agit ni de Louis le Débonnaire ni de S. Louis, mais de Louis. VII, dit le Pieux, qui fit plusieurs voyages dans le Mâconnais, un entre autres en 1147, alors que ce roi partit pour la croisade. Pour l’explication des vers, il veut qu’on joigne mors ibat, la mort frappait, fugiat qu’elle fuie !... Du reste, dit-il, il ne s’agit pas d’une érection d’église, mais d’une reconstruction. Notre-Dame d’Avenas était plus ancienne. Elle dépendait jadis d’un monastère nommé Pélosge, et se trouve à ce titre souvent mentionnée dans les Actes du Cartulaire de Saint Vincent de Mâcon du IXe siècle. L’un de ces actes nous apprend même qu’il y avait alors à Avenas une autre église ou chapelle, dédiée à Saint Julien, qui n’existe plus. Ai-je besoin de dire que Louis VII est surtout appelé le Jeune et non le Pieux ; qu’en 1147, il partit à la croisade par Metz et non par le Mâconnais, qu’enfin l’explication donnée pour les vers est assez médiocre. Du reste, M. dé là Roche-Lacarelle fit une réponse modérée, courtoise, mais probante : d’après les appréciations les plus compétentes, dit-il, le costume des personnages, les figures, la forme des lettres de l’inscription, le style de la sculpture sont du IXe ou tout au plus du Xe siècle. De plus l’inscription donne le quantième du mois, non celui de l’année, chose fréquente au IXe siècle et très-rare au XIIe ou XIIIe.
  • Quatrième version
    que nous croyons être la vraie. — Là où est Avenas existait là paroisse de Rosarias, ou Rosières. Sur cette paroisse il y avait un antique monastère de religieuses, appelé le monastère de Pélosge. Après la défaite de Poitiers, les Arabes s’établirent fortement à Tourvéon. Le monastère subit les conséquences de ce redouté voisinage, il fut rasé, et les religieuses furent massacrées ou dispersées. L’abbesse Anstrude, pour sauver les biens de l’abbaye, les remit entre les mains de Charlemagne. Quand, la paix fut revenue, l’évêque de Mâcon les réclama à Louis le Débonnaire, appelé aussi Louis le Pieux, comme biens d’église ; on fit droit à sa réclamation. Louis fit mieux encore : il fit bâtir une église sur l’emplacement du monastère de Pélosge. Cette église devint le centre de la paroisse de Rosarias, dont le nom disparaîtra bientôt pour faire place à celui d’Avenas. Le fameux autel de calcaire blanc fut également un don de Louis-le-Pieux.

    L’ensemble de ces faits est prouvé par le Cartulaire de Saint Vincent de Mâcon. Le nom d’Avenas n’est connu que depuis la seconde moitié du Xe siècle. On le trouve sous ces deux formes : Avenacum et Avanacum. Pourquoi ce nom ? On donne comme étymologie : Avena, avoine, cette plante étant à peu près l’unique production de ce pays. Il n’y a pas lieu de contredire cette assertion, mais ce nom, à notre avis, aurait une origine plus probable : une bienfaitrice de l’église fut la comtesse Albanne, ou plus généralement Avane, femme de Warin II, comte souverain de Mâcon. De là plus probablement le nom d’Avenas. Quant aux vers de l’inscription, voici comment il faudrait les rétablir, en changeant fluiturus, qui est un barbarisme, en fluxurus :

    Rex Ludovicus plus et virtutis amicus,
    Offert Ecclesiam. Recipit Vincentius istam,
    Lampade bissena fluxurus Julius ibat,
    Mors fugat obpositum régis ad interitum.

    « Le Roi Louis le Pieux et l’ami de la vertu, offre cette église, Saint Vincent (le Chapitre) la reçoit. Encore douze soleils, juillet allait paraître. Mais la mort chasse devant elle ce qu’on lui oppose, c’est-à-dire les gages qu’on lui offre pour conjurer la mort du Roi. » On sait en effet que Louis le Débonnaire est mort le 20 juin 840.

    D’après ce qui précède, le monastère de Pélosge était un monastère de religieuses, ce n’est pas douteux d’après le Cartulaire de Mâcon. Severt a donc eu tort, en appelant ce monastère Peloux, d’en faire un monastère d’hommes suivant la règle de Saint Benoît et ayant précédé l’établissement de Cluny, auquel il aurait été annexé dans la suite.
    Dans l’église d’Avenas, on voit aussi l’épitaphe d’un ancien curé, Jean Minet, mort en 1292 : Hic jacet Dominus Joannes Minet P. curatus hujus ecclesioe, qui obiit anno Domini MCCXCII. — Ce P. nous induit à penser qu’à cette époque les curés d’Avenas étaient des moines, et qu’il faut le traduire par Prior.

    Le château d’Avenas était flanqué de tourelles et dominé par un pavillon ; la maison-forte appartint aux Noblet, aux Meschatin de La Faye, aux Laurencin.

    Quant aux curés, les Provisions de l’ancien diocèse de Mâcon n’existant pas, et les registres paroissiaux n’ayant pas été communiqués, nous ne pouvons donner les noms que des deux derniers curés, M. Teillard et M. Pillet. Ce dernier ; y était déjà en 1759."


Portfolio

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